Au commencement de la création, avant les paroles créatrices de Dieu, le livre de Genèse décrit ainsi l’état du monde : informe, vide, et rempli de ténèbres. Ces trois états décrivent aussi ce que nous sommes ou devenons lorsque nous sommes éloignés de Dieu et en dehors de sa présence et de son action.
Mais l’Esprit de Dieu est là, au-dessus des eaux, il bouge déjà, et bientôt Dieu va parler, et la totalité de la matière chaotique qui est là va se ré‑agencer, se remplir de sa présence, répondre à sa parole et former un monde magnifique qui nous remplit d’émerveillement.
Lors de cette première création, c’est Dieu qui a fait le choix de venir. Il s’est mis en mouvement :
Faisons l’homme à notre image, à notre ressemblance. Gn. 1:26
On sent bien dans cette expression la décision de Dieu. Elle exprime ce mouvement global de Dieu vers cette matière sans nom, sans expression et sans présence. Elle est l’expression d’un désir. Ce n’est pas juste la décision semblable à celle d’un scientifique extrêmement puissant qui voudrait jouer avec un peu de matière. Non, c’est l’élan d’un Dieu qui se décrit comme un Père, et même père et mère à la fois.
Dans Gn. 1:2, il est dit que l’Esprit de Dieu se « mouvait ». Le verbe hébreu « rachaph » reflète le caractère maternel du Rua’h de Dieu. On peut le traduire par : planer, voltiger doucement, ou trembler. Il n’est présent que trois fois dans l’Ancien Testament, et on le retrouve dans Deut. 32:11 :
Semblable à l’aigle qui agite son nid, voltige sur ses petits, étend ses ailes et les porte tout en volant.
C’est intéressant car ce moment où les aiglons vont devoir apprendre à voler est à la fois un défi d’éducation, en même temps qu’un acte de protection. Un mélange de tendresse et de soin pour chaque petit, et d’encouragement à relever le défi du vide et à sortir du nid !
À la création, l’Esprit de Dieu est là qui plane aussi. Il étend ses ailes sur cette matière sans existence réelle, perdue au milieu des eaux C’est là aussi une référence maternelle. Les eaux, dans la Bible, sont un symbole de purification mais aussi d’enfantement, comme le liquide amniotique qui entoure le bébé dans le ventre de sa mère, pour le nourrir et le protéger à la fois. Depuis l’intérieur de ses eaux, et dans le souffle de l’Esprit, ce qui n’était pas parvient à l’existence, est nommé, s’organise, reçoit la vie.
Ainsi naît le monde, lorsque Dieu décide de venir à lui.
La repentance est une forme de recréation, mais cette fois, c’est nous qui revenons vers Dieu. C’est le mouvement des créés, des engendrés, des fils et des filles qui retournent au Père et choisissent la vie qu’il a voulue pour eux dès les commencements. C’est la raison pour laquelle elle ne peut pas être superficielle. La repentance produit une transformation, une métamorphose semblable à celle de cette première création.
Hors du Tohuw
Définition : informe, confus, irréel, ou illusoire. L’état de « tohuw » nous rapproche de ce qui est vain, ce qui est néant, d’un lieu désolé et dévasté.
Parfois nous oublions la gravité et la profondeur de l’effet du péché et de l’iniquité. Le jardin d’Éden remonte à si loin que nous n’avons plus aucune idée de ce que seraient le monde et la vie s’ils n’avaient pas été touchés par le péché. Alors nous avons tendance à sous-estimer et minimiser l’effet du péché. Mais sa puissance destructrice est immense, et il nous ramène au « tohuw ». On retrouve cet état dans Deut. 32 à nouveau, au verset 10 :
Il trouva son peuple dans un pays abandonné, dans un désert dévasté et rempli de hurlements.
Voilà un type de mort dans lequel le péché nous amène : l’abandon, la solitude, le désert, la dévastation, et la souffrance. J’insiste un peu, et je sais que quelque chose réagit déjà chez certains d’entre vous. Une sorte de résistance à voir la réalité de la destruction du péché à ce niveau-là. Pourtant c’est la réalité. Nous sommes morts à cause du péché. La séparation d’avec Dieu nous fait retourner à l’état informe de chaos, quand bien même nous ne nous en rendons pas compte. Mais l’actualité autour de nous est là pour nous le rappeler, spécialement dans cette année.
Le « tohuw » a encore d’autres conséquences. Nous courons après des choses vaines et qui n’existent même pas (1 Sam. 12:21), nous sommes la proie des faux dieux (Es. 41:29), nous nous égarons et ne savons pas dans quelle direction aller (Jb. 12:24).
Lorsque nous nous repentons, Dieu nous redonne notre forme première, et il nous réoriente vers ce qui a du sens, nous retrouvons de l’existence. Et surtout, nous sommes à nouveau habités :
Ainsi parle ADONAI, qui a créé les cieux, Dieu qui a façonné et fait la terre, qui l’a établie et créée pour qu’elle ne soit pas un chaos, mais qui l’a formée pour être habitée : je suis ADONAI, il n’y en a pas d’autre. Es. 45:18
La repentance met fin au chaos, et permet à nos vies d’être ré-habitées par la présence de Dieu ! C’est déjà le cas à la nouvelle naissance : nous étions sans forme et séparés de Dieu, et l’Esprit de Dieu est venu habiter en nous ! Cette notion d’être une habitation de Dieu en esprit, une maison pour lui, nous devons la creuser encore et encore car elle est une bénédiction infiniment précieuse ! Nous nous repentons pour que chaque partie de nous, chaque parcelle de notre esprit, de notre âme et de notre corps, chaque domaine de notre vie, chaque sphère de responsabilité soient habités à nouveau par la plénitude de l’Esprit de Dieu qui crée la vie et forme ses projets en nous.
Hors du Bohuw
Définition : nul, vide, perdu, détruit.
Traduit généralement par « vide », il reflète un vide de sens et de construction qui puisse être utile à la vie, plus qu’un vide de matière. C’est un peu comme après une catastrophe, lorsque tout a été détruit, et qu’on dit : « il ne reste plus rien ». Il reste beaucoup de choses, de débris, de ruines, de gravas, de poussière. Mais plus rien n’est utilisable. Le bohuw, c’est ce rien. Toute organisation qui permettait la vie a disparu et c’est le désordre et la destruction de tous les côtés.
Dans ces dernières années, on a beaucoup parlé d’alignement et d’ordre divin. Cet alignement est le processus par lequel Dieu réordonne et reconstruit. La repentance est le passage obligé pour ce réalignement, ce retour à l’ordre d’en-haut et au sens que Dieu veut donner à la vie.
Je constate que trop souvent nous déclarons des alignements en essayant, consciemment ou non, de faire des raccourcis et d’éviter la repentance. Mais sans retour authentique et profond à Dieu, il n’y a pas de réalignement possible.
Lorsque tout est détruit quelque part, toute la matière qui est là doit se laisser saisir par de nombreux ouvriers pour que l’endroit puisse retrouver une forme qui permette de reconstruire. Il en est de même pour nos vies. La repentance implique de laisser Dieu saisir la matière de nos vies, trier ce qui doit être trié, jeter ce qui doit être jeté, et redresser ce qui peut l’être. Ensuite, il pourra créer de nouvelles choses et reconstruire, encore plus beau, et plus grand même, qu’avant. Mais il y a une position d’humilité dans laquelle nous devons entrer pour nous laisser saisir.
Ce mot « bohuw » est utilisé d’une drôle de manière dans Es. 34:11 :
Il [Dieu] étendra sur lui le cordeau de la confusion et le fil à plomb du vide.
Normalement, le cordeau et le fil à plomb sont des instruments de construction, mais dans ce contexte, ils sont d’abord utilisés pour mesurer la démolition !
Dans la repentance, nous devons laisser le cordeau et le fil à plomb de Dieu mesurer le chaos, avant qu’ils puissent servir à reconstruire.
Cette réorganisation doit toucher jusqu’à nos fondations. C’est un message qu’on ne cessera de donner encore et encore. Il y a trop de fragilités dans nos vies et dans nos ministères qui viennent de ce que nos fondations personnelles et générationnelles n’ont pas été assez touchées. Trop d’orgueil encore, de rébellion et d’arrogance, qui nous empêchent de vivre une vraie repentance et par lesquels nous nous efforçons de croire que nos vies ne sont pas si mal que ça, que nos lignées générationnelles sont ok, que nous pouvons avancer et que ça va le faire. Mais ça ne le fait pas. Des parties de nos vies et de nos ministères ou de ceux de nos enfants s’effondrent, et nous ne comprenons pas pourquoi.
Il faut laisser le cordeau et le fil à plomb de Dieu descendre jusque dans les fondations.
Ces derniers mois nous ont beaucoup ébranlés. Cela ressemble effectivement à un tremblement de terre, l’image n’est pas inintéressante. Ces ébranlements ont mis à la lumière les failles, les effondrements cachés, et différents problèmes qui n’étaient que sous-jacents. Debout au milieu des failles et de nos questionnements, nous faisons face à Dieu dans cet enjeu vital : Dieu pourra-t-il se servir des circonstances pour établir dans nos fondations brisées la nouvelle création, ou bien nous laisserons-nous séduire par des élans de rébellion, de colère, d’indépendance, ou céderons-nous à la dépression et à la paralysie ? Une sorte de stress post-traumatique sur lequel l’Esprit de Dieu s’invite pour planer, rassurer et murmurer l’espérance et la foi.
Ne restez pas dans l’effroi. Tout ceci peut nous conduire à un processus de mise à la lumière et de repentance avec Jésus, en Jésus et par Jésus. Il est dans le coup à tous les niveaux, et son œuvre est parfaite ! Il a tout accompli. Alors pourquoi vouloir reconstruire seulement en surface plutôt que de descendre avec lui dans les profondeurs pour que tout ce que nous portons du passé et du présent soit ré-agencé, réorganisé, reconstruit, voire recréé, pour recevoir la vie nouvelle qu’il nous a promise et nous émerveiller à nouveau devant tout ce qu’il va déployer au travers de nous !
Hors des ténèbres
Les ténèbres sont le lieu de l’obscurité, et dans la Bible, elles sont associées à plusieurs reprises à l’ombre de la mort (Jb. 10:21 et 12:22, Ps. 107:10 et 14, Es. 9:2, Lc. 1:79). En tout cas, ce n’est pas un endroit où on a envie de rester et de vivre. Les ténèbres, c’est même la seule face que l’Éternel offre à ses ennemis. Lors de sa sortie d’Égypte, le peuple d’Israël arrive au bord de la mer Rouge à la tombée de la nuit. Pour le protéger, Dieu élève sa nuée entre lui et les Égyptiens, mais cette nuée est très spéciale :
Elle se plaça entre le camp des Égyptiens et le camp d’Israël. Cette nuée était ténébreuse d’un côté, et de l’autre elle éclairait la nuit. Et les deux camps n’approchèrent point l’un de l’autre pendant toute la nuit. Ex. 14:20
Dieu offre la lumière à son peuple, et les ténèbres à ses ennemis. On retrouve encore un peu cette même idée dans Es. 60:2 :
Voici, les ténèbres couvrent la terre, et l’obscurité les peuples, mais sur toi l’Éternel se lève, sur toi, sa gloire apparaît.
La lumière pour Israël, les ténèbres pour les peuples et les nations qui ne sont pas tournés vers lui. La lumière est un cadeau que nous devons chérir et choisir. Dans Jn. 3:19, Jésus explique à ses disciples que les hommes ont choisi les ténèbres plutôt que la lumière, et que c’est le jugement qui est venu sur eux parce qu’ils pratiquaient les œuvres des ténèbres. La repentance est une invitation à sortir des ténèbres pour passer à la lumière. On ne peut pas passer comme on veut de l’un à l’autre pour y faire ce qu’on veut. On ne peut pas jouer avec Dieu. Il y a une vie de pureté et de sainteté qui convient à la lumière et qui s’accompagne d’œuvres de lumière.
Il y a quelques années, j’ai eu une discussion fort intéressante concernant des jeunes qui tenaient le discours suivant : « Je sais que je pèche et je n’ai pas envie d’arrêter. Mais le jour où je veux le faire, je sais que de toute façon, Dieu nous pardonne. Donc je me repentirai et il me libèrera. »
Dieu n’est pas un distributeur de libération et de purification pour les jours où ça devient compliqué. Ça ne fonctionne pas comme ça. La vraie repentance est plus que des mots où nous demandons pardon, c’est un choix et une volonté de changer et de ne plus recommencer. Même si je ne suis pas sûre d’y parvenir, j’en ai en tout cas le réel désir. Et pas seulement pour me tirer d’affaire, mais parce que j’aime Dieu, que mon péché lui déplaît, et que je veux l’aimer non seulement en mots mais aussi en actes.
La lumière de Dieu est plus qu’une clarté. Elle est puissance, elle est substance, elle est atmosphère. Et elle est admirable. Dans les théophanies comme dans les visions que nous pouvons avoir, la lumière rayonne de Dieu lui-même. Elle est plus qu’un assemblage d’ondes physiques qui produisent un éclairage. Elle est Dieu lui-même sous une autre forme : Jésus lumière du monde (Jn. 8:12).
Lorsque nous venons à la lumière de Dieu, ce ne sont pas seulement les ténèbres autour de nous qui disparaissent, mais nous devenons nous-mêmes lumière :
Autrefois vous étiez ténèbres, et maintenant vous êtes lumière dans le Seigneur. Eph. 5:8
Nous avons été créés à nouveau par la lumière, nous sommes des enfants de lumière, nous sommes lumière.
Dans cette lumière, nous sommes en communion parfaite avec Christ (1 Jn. 1:7), nous avons part à l’héritage des saints (Col. 1:12), et nous sommes armés de lumière (Rm. 13:12).
Dans les combats que nous avons à mener, nous pouvons utiliser les armes des ténèbres ou les armes de la lumière. Il nous faut être attentifs à cela. Soyons une armée qui s’assure d’avoir revêtu les armes de lumière !
1 Pe. 2:9 dit de cette lumière qu’elle est admirable. En grec, thaumastos : étonnante, merveilleuse, digne d’admiration, excellente, dépassant notre intelligence et notre compréhension, causant à la fois de l’étonnement et de la terreur, extraordinaire, frappante, ou stupéfiante. Puissions-nous vivre une vie de repentance, et être éclairés et possédés par cette lumière. Qu’elle se répande tout autour de nous pour chasser toutes ténèbres, et amener toute la création qui nous a été confiée dans la plénitude de la lumière de l’Agneau.
Depuis des milliers d’années, le Père attend le moment glorieux où la nouvelle création naîtra, affranchie pour l’éternité du chaos et de la confusion dans lesquels le diable avait amené la première création par la chute. Depuis 2000 ans et plus, l’espérance est là, et cette nouvelle création a commencé à apparaître derrière Jésus, son premier-né.
L’invitation à la repentance est beaucoup plus que le constat du péché qui a envahi le monde et pour lequel il faut faire quelque chose. Elle est un ordre de mission de Dieu en réponse aux douleurs de l’enfantement dans le monde, afin que la nouvelle création paraisse et brille, et que Jésus attire tous les hommes à lui avant son retour.
Qu’un esprit de repentance soit sur nous tous pour sortir du tohuw-bohuw et des ténèbres et révéler le monde à venir et le roi extraordinaire qui nous attend.